Les affaires sales sont dans la machine, le sac est débarrassé, les mails sont lus, les photos sont téléchargées.
Ne me reste plus qu’à écrire pour achever ce petit rituel de retour de manip...
Voici deux semaines que j’ai quitté PAF pour retrouver les îles du Golf. Après avoir crapahuté à Sourcil Noir et Phonolite, Lise et moi avons retrouvé cet environnement qui nous est plus familier. Les îles sont notre terrain de jeu favori et je ne me lasse pas d’arpenter celles sur lesquelles nous avons la chance de séjourner. Des points de vue différents, une faune et une flore particulière…c’est une nuance infinie d’ambiances qui s’offre à nous.
Lundi 26 avril,
c’est parti pour 4 jours sur Mayès accompagnés de nos acolytes d’ornithos (Alexis et Pierrick).
Nous avions déjà fait un passage furtif sur l’île il y a un peu plus d’un mois pour réaliser des lectures de transects. Transects à qui nous avons de nouveau rendu visite pour effectuer des mesures de profondeur de sol.
Le lendemain, en fin de matinée, nous avons fini notre travail. Nous en avons donc profité pour donner un coup de main aux ornithos qui réalisent sur l’île un suivi démographique de la population de Pétrel Bleu. Ces oiseaux nocturnes vivent dans des terriers. Environs 200 sont marqués et contrôlés d’année en année. Le principe de la manip est simple : repérer les terriers et vérifier s’ils sont occupés ou non. Dans des positions bien souvent tordues et inconfortables, nous enfonçons le bras pour tenter d’atteindre la chambre. Les Pétrels disposent d’un crochet au bout du bec ! La présence d’un oiseau dans la chambre ne fait donc aucun doute ! Ne reste plus qu’à le sortir du terrier, l’identifier par son numéro de bague, le baguer si ce n’est pas encore fait et réaliser de la biométrie. Les choses ne sont malheureusement pas toujours aussi simples qu’il n’y paraît...les terriers sont de vrais labyrinthes!
Mercredi soir, le ciel est dégagé. Le vent est faible. C’est le moment ou jamais pour faire une session de capture au filet. Tendu sur une vingtaine de mètre devant une zone de terriers, le filet permet de piéger les Pétrels en vol. Toutes les 15 min, nous allons récupérer les oiseaux pris dans la maille et les plaçons dans une poche en tissu pour limiter le stress. De retour à la cabane, Pierrick et Alexis se chargent d’identifier et mesurer les individus capturés avant de les relâcher. Un fond de musique, des murmures, des mouvements légers,…tout est fait pour que l’ambiance dans la cabane soit la plus calme possible. Une soirée vraiment géniale.
Lise relâche un Pétrel bleu...
...puis c'est mon tour!
Mais Mayès ne se résume malheureusement pas uniquement à ses oiseaux. Les Souris ont littéralement envahi l’île. A la nuit tombée, elles sont des vingtaines devant la cabane. A peine effrayées par notre présence, elles n’hésitent pas à nous courir entre les jambes. Fort heureusement, la cabane est « étanche » et leur présence ne se limite qu’à l’extérieur et aux cloisons (j’étais à deux doigts d’appeler les forces de l’ordre pour tapage nocturne).
Vendredi 30 avril,
nous quittons Mayès pour Australia. A notre tour de faire bosser les Ornithos …Une heure de manip et nous voilà tout les 4 (les ornithobios pour l’occas) en week end ! Ca tombe bien car nous avions prévu un petit trek de deux jours sur l’île (la deuxième plus grande du Golf après Ile Longue).
Australia Sud
Première étape, la cabane d’Australia Nord située à environ 4h de marche de la cabane d’Australia Sud. La météo est excellente et nous en profitons pour faire un détour par les hauts plateaux. L’occasion d’admirer l’île voisine qui n’est ni plus ni moins que Mayès. Depuis les hauteurs, elle semble bien petite mais les ornithos (un peu bretons) ne peuvent s’empêcher de clamer sa grandeur ! Il faut quand même se rendre à l’évidence : il est vrai qu’Australia, malgré ses paysages de rêve, fait pâle figure en terme de faune…on ne peut pas tout avoir !
Les ornithos et Mayes...toute une histoire d'amour!
la team Ornithobio
Le lendemain, passage au Nord Ouest de l’île pour admirer les lacs puis ascension du Mont Cookii avant de retourner à la cabane du Sud.
Après deux jours de marche sous le soleil (chose de plus en plus rare) nous retrouvons des lits douillets des images plein la tête. Mais vers 1h, impossible de fermer l’œil. Je m’étonne même à ressortir et finir mon bouquin (petite pub en passant pour La Princesse des glaces de Camilla Läckberg…super ! merci les amis). Je ne suis pas le seul à ne pas trouver le sommeil…
Lundi 03 mai,
Alors que nous faisons route en chaland vers Mayès pour y redéposer les ornithos, nous apprenons qu’il y a eu une grosse aurore australe dans la nuit…vers 1h du matin ! Or, les aurores provoquent des anomalies magnétiques ! Il ne nous en faut pas plus pour comprendre la raison de nos insomnies ! Morale de l’histoire : la prochaine fois que je n’arrive plus à dormir, d’abord aller jeter un œil dehors avant de se plonger dans un livre (merci les amis ! j’ai loupé une aurore ! lol).
Après une semaine passée en compagnie de nos amis ornithos, il est temps pour Lise et moi de retrouver la quiétude de notre binôme. Mais c’est sans compter sur les Choux et Azorelles de Ile Verte ! Ces derniers s’impatientent depuis janvier que nous leur rendions de nouveau visite !
Presqu'île Ronarch depuis la cabane de Verte...ma vue préférée!
Nous passons 4 jours assis, à genoux, à 4 pattes, courbés, allongés,…en fait n’importe quelle position qui permet d’avoir la tête au ras du sol…pour mesurer les Choux et Azorelles marqués.
Bien évidemment il nous faut composer avec la météo :
10h01, soleil sans vent.
10h15, pluie.
10h26, le vent s’est levé.
10h27, on se croit de nouveau en été.
10h33 on est en plein blizzard !
En 32 minutes, voilà les quatre saisons qui se sont succédées ! De quoi rendre chèvre une grenouille !
Heureusement, nos vêtements de terrain nous permettent de faire face à toute sorte d’intempérie. Et puis on finit par acquérir certains automatismes. Par exemple, quand on est à 4 pattes, toujours présenter le postérieur face au vent ! Primo, ça permet de protéger le visage de la grêle, les fesses étant beaucoup moins sensibles. Secundo, ça évite de faire du papier mâché avec les feuilles de manip !
Ile Suhm
Ecrit dans la nuit du 3 au 4 mai.
Ile Verte,
Dans la cabane, personne ne dort.
Lise s’est réfugiée dans un livre.
Je suis subjugué et hapé,
Fasciné et terrifié.
Il est 4h30.
Dissimulée par d’épais nuages, la Lune peine à éclairer la scène.
Dehors, tout est de gris.
De cette masse monochrome émergent des halots blanchâtres.
A folle allure, des ondes fantomatiques flottent, se déplacent et glissent à la surface de l’eau.
Le lit tremble,
La cabane vibre,
Ile Verte toute entière semble gronder.
L’air déferle sur notre abri.
Le bois craque.
Les murs grincent.
A ce stade,
Le tout n’est pas de savoir si la cabane a déjà affronté de telles forces,
Mais de savoir si elle peut résister à nouveau.
Car dehors,
Le vent souffle
Et la tempête fait rage.
A la VAC du lendemain, nous avons appris que dans la nuit le vent a soufflé à environ 150km/h de moyenne. Des rafales à 218km/h ont été enregistrées à proximité de la base (il y a eu quelques dégâts matériels).
Sur Ile Verte, il était hors de question de sortir un anémomètre à la main ! Nous ne saurons donc jamais à combien le vent a soufflé. Tout ce que je peux vous dire, c’est que Lise et moi en avions des crampes d’estomac tellement s’était flippant. Mais la cabane a tenu bon…merci l’IPEV de nous faire des abris aussi solides.
Sur ces bonnes paroles, je vous souhaite bon vent à tous.