8 janv. 2010

Ile Verte

Je refais surface après un petit séjour de 4 jours sur Ile Verte. L'occasion pour moi pour de vous faire découvrir une autre facette de Kerguelen.

Pour replacer le tout dans son contexte, le programme Ecobio pour lequel je bosse suit sur plusieurs îles du Golf du Morbihan (de Kerguelen) des populations de Choux de Kerguelen et d'Azorelle. Chaque île ayant sa propre histoire (présence ou absence de lapin, éradication du lapin, présence de chats,...) cela permet d'étudier sur le long terme comment s'adapte la végétation originelle pour chacun de ces patrons. Sur le terrain, notre travail consiste à repérer sur le pourtour des îles des Choux et Azorelles marqués, d'effectuer des mesures biométriques et de marquer des germinations.


Nous voilà donc, tels des naufragés, à nous approprier cette petite île dont le point culminant de dépasse guère 50m. Ca peut sembler peu sur papier, mais quand tu fais au moins un tour de l'île par jour et quelques détours vers le centre, tu es bien content de regagner le confort de la petite cabane qui nous a servi de refuge.

Une cabane elle aussi sans prétention mais qui s'est avérée particulièrement chaleureuse. Un intérieur en bois, personnalisé et décoré au fil des années par les différents occupants. Une cabane qui s'est imprégnée de toute une histoire que tu peux lire et découvrir dans les dessins et petits mots sur les murs. Tu plonges dans l'intimité d'un lieu chargé d'émotions.

Tu regardes par la fenêtre et découvres un panorama sur le Golf du Mobihan et ses îles. Alors que tu scannes ce paysage de rêve pour essayer de le graver dans un coin de ta tête, ton regard se fige sur la petite colonie de Papou qui a élu domicile sur la plage en contrebas. Ils batifolent dans l'eau et se prélassent sur des matelas de Leptinella plumosa sans se soucier de ce nouveau voisinage!

Le dessous de la cabane semble lui aussi un abris douillet pour quelques Pétrels et Océanites qui semblent gênées par le bruit que nous faisons. Elles nous le font clairement comprendre par leurs petits cris...c'est ce qu'on appelle un conflit de voisinage!

Et pour finir, une colonie de Cormorans niche sur la petite falaise située sur la plage. Les poussins sont déjà bien grands (pratiquement aussi gros que les parents) et encore vêtus de leurs gros duvet grisâtre. Ils harcèlent les parents pour un peu de nourriture. Ces derniers cherchent désespérément à dormir et ignorent les petits en plongeant leur tête sous les ailes.

Notre manip nous oblige à réaliser le tour de l'île. Encore l'occasion de croiser ces oiseaux aux comportements si différents l'un de l'autre. Ainsi, les Chionis (aussi appelés Pougeons car ils font penser à des poules et sont aussi bêtes que des pigeons) semblent particulièrement intrigués par ces bipèdes qui mesurent des choux. Ils n'hésitent pas à s'approcher par curiosité! Les Goélands quant à eux nous font bien comprendre que nous sommes sur leur territoire en volant autour de nous et en tentant de nous chier dessus (heureusement, le vent rend ce genre d'objectif assez difficile à atteindre). Les Sternes, aussi petites et belles soient-elles, tentent de nous intimider en nous plongeant dessus et en poussant des petits cris de mécontentement. La méthode est plutôt concluante et nous fuyons pour leurs échapper! Bien sûr tout ça nous fait bien rire sur le coup mais quand il s'avère que ta station de Choux se situe en plein dans leur territoire, ça commence réellement à devenir inquiétant! Enfin, les Skuas veillent à ce que nous ne fassions que passer sur leur territoire. Dès lors que tu passes la frontière, ils s'envolent et foncent droit vers toi avant de se poser ailes déployées à tes côtés. Ils se contentent ensuite de te suivre telle une escorte jusqu'à ce que tu sois sorti de leur espace vital. Un espace jonché de cadavres d'oiseaux. Car ces oiseaux chassent les petits Pétrels Bleus qui nichent dans des terriers. On en a vu creuser dans la terre située au dessus de la chambre pour pouvoir en extirper le poussin et ainsi pouvoir nourrir leur propre rejeton! Film d'horreur ou dure Loi de la nature? Le problème, c'est qu'à Kerguelen les cadavres se décomposent très lentement! L'ambiance qui émane de ces véritables charniers s'avère même parfois un peu pesante.

Remis de toutes ces émotions, nous regagnons la cabane. La chaleur dégagée par les radians est accueillie à bras ouverts et permet de faire sécher les vêtements (si il a plu). Le corps ainsi réchauffé nous nous réunissons à table, à la lueur d'une bougie autour d'un apéro. Une ambiance qui prête aux petites confidences et à ces merveilleuses discussions qui refont le monde. L'heure tourne, le soleil se couche et l'estomac crie famine après cette journée de terrain. Heureusement, les cabanes sont richement ravitaillées par l’IPEV et nous avons embarqué du frais (oeufs, fromage, viande, pain,...) avec nous. Les repas sont copieux mais tellement bon. Quoi de mieux qu'un bon boeuf bourguignon ou une tartiflette pour se remplir la panse. Et puis le hasard à plutôt bien fait les choses: c'était l'anniversaire de Lise le 06. Nous avons donc eu droit au fois gras et au Sauternes! Prétexte également pour faire un gâteau au chocolat et un crumble aux poires et caramel au beurre salé! Des plaisirs qui sont déjà bien appréciés en métropole mais qui prennent une tout autre dimension dans cette petite cabane.

Bien entendu, tout est relatif et ce confort reste sommaire dès qu'il s'agit de se laver ou d'aller aux toilettes! Ici, pas de salle de bains et encore moins de WC. Nous nous contentons donc de nous laver les dents et de nous rincer le visage à l'eau de pluie. La plage quant à elle sera un endroit de premier choix pour faire ses besoins! Le simple fait d'uriner relève de l'aventure quand il y a du vent! Les anciens hivernants, riches d'une année d'expérience, nous ont ainsi conseillé d'adopter la position "3/4 dos au vent"...seul moyen de pas d'en mettre partout! C'était pour la petite anecdote!

Chaque jour, à 17h30 précise, nous renouons contact avec la base. C'est en effet l'heure de la VAC. C'est un moment que j'apprécie particulièrement. En fait, pour des raisons de sécurité, chaque groupe de manipeur doit contacter le BCR (centre de communication sur base) pour confirmer que tout va bien. Du coup, à 17h30, tout le monde hors base cesse l'activité en cours pour se brancher sur le canal 26 ou 27. Tour à tour, on peut donc entendre la voix de personnes que je n'ai même pas encore croisé sur base. C'est aussi l'occasion de recevoir le bilan météo pour les deux journées à venir (...important pour planifier les manips!) ou de passer des petits messages persos. Voilà comment toute l'île Kerguelen a pu souhaiter un joyeux anni à Lise!

4 jours se sont écoulés et il est déjà temps de repartir. Le chaland ne passe que vers midi et comme nous avons fini nos manips, nous en profitons pour faire un cake avec les restes et quelques cookies...histoire de faire plaisir aux pilotes du chaland et d'évacuer les restes (à Kerguelen, rien ne se perd, tout se transforme).

Aux alentours de 11h30, nous entendons le bruit du chaland qui approche et qui vient beacher (action de s'échouer sur la plage) pour nous permettre de monter à bord avec notre matériel. Puis nous faisons cap vers PAF qui prend d'un coup des dimensions énormes en comparaison à la vie en cabane. Un retour à la civilisation, aux horaires fixes, au stress! C'est réellement comme un retour en ville après une semaine de rando dans les Alpes ou un sejour en campagne! Mais c'est aussi un joie de pouvoir a nouveau prendre une douche et consulter ses mails!

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